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La Lanterne
17 février 2008

Promets-moi (Emir Kusturica, 2007)

prometsmoi01Je parlais il y a quelques temps de Papa est en voyage d'affaires (1985). Depuis, vingt-deux ans se sont écoulés et Promets-moi vient rendre compte de la tournure des évènements. Si autrefois une note réaliste osait s’insinuer dans le propos, aujourd’hui il n’en est rien. Désormais, Emir Kusturica se charge de gommer toute trace un tant soi peu dramatique qui pourrait venir parasiter son style gargantuesque. Son dernier film nous emporte au fin fond de la campagne serbe. Le jeune Tsane vit avec son grand-père dans les collines, près de sa vache et de son institutrice. Sentant que la fin approche, l’aïeul confie à son petit-fils trois taches à accomplir : vendre la vache au marché, rapporter une icône avec l’argent et se trouver une épouse. Si les deux premières épreuves s’avèrent relativement faciles, la troisième apporte son lot de difficultés.

prometsmoi02Le dernier Kusturica relance la question du renouveau chez les auteurs. Certains diront de Promets-moi que c’est du déjà-vu. Sans doute ont-ils raison. D’autres affirmeront que c’est un film tout à fait plaisant. Sans doute ont-ils raison eux aussi. Le tout est donc de savoir comment se situer face à l’œuvre : soit la mettre en rapport avec tous les films qui lui ont précédé, soit l’aborder en tant que « simple » entité. Mais l’un ne va pas sans l’autre. Kusturica ayant gagné son titre d’ « auteur » il y a des années de cela, c’est toujours en tant que bloc s’impliquant dans toute une œuvre que chacun de ses films doit être analysé. De ce côté-là Promets-moi peut décevoir en ce qu’il n’apporte rien de concrètement nouveau. Néanmoins « déception » est un mot bien trop fort tant le film témoignerait plutôt d’une constance : en aucun cas Kusturica n’a perdu de sa verve artistique. La polémique aurait dû s’arrêter là. Mais étrangement la critique s’est acharnée sur ce pauvre Promets-moi dont l’ « infériorité affligeante» (disent certains) aurait eu raison de son parcours médiocre dans les salles françaises. Une injustice ridicule pour le coup. Je dis non ! Le dernier Kusturica ne mérite pas un tel sort !

prometsmoi03Pour le coup, le monde d’Emir se veut extrêmement manichéen : d’un côté le mal, de l’autre le bien. Et pour cause, nous sommes en plein conte ! Les personnages sont dessinés dans cette optique : le jeune héros facétieux et la belle pucelle mènent la danse au premier rang, épaulés par des adjuvants tout droit sortis d’un film burlesque (les deux farfelus avec leur caravane comme le grand-père) et opposés à des méchants moches et pervers. Evidemment on est chez Kusturica… alors place à la bouffonnerie, aux gags en tous genres (la palme pour la scène de castration du taureau), à la fanfare ininterrompue mais surtout à la poésie. Le conte est servi « à la serbe », porté par cette euphorie désormais constante qu’on aurait tendance à croire nationale. La verve satirique de l’auteur connut en revanche des périodes plus fastes. Il se contentera ici de lancer quelques pichenettes à propos de la prostitution ou d’un certain idéalisme américain mais sans plus. Toute l’attention se porte sur l’effet « conte », quitte à laisser rouiller quelques jointures techniques ou négliger l’avancement de la trame sur des tranches de cinq minutes. La scène finale parvient pourtant à effacer toutes ces erreurs superficielles. Le mariage ultime est une bombe, un bordel sans nom, une jouissance démesurée.

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