Bienvenue chez les Ch'tis (Dany Boon, 2008)
L’affiche, les comédiens, le sujet, le genre… tout dans Bienvenue chez les Ch’tis aurait tendance à faire peur. A l’évidence, encore une de ces comédies françaises bien fades comme il en sort toutes les semaines et dont l’essentiel a été calé dans la bande-annonce ! On connaissait le Dany Boon comique, le Dany Boon acteur… et bien désormais il faudra se taper le Dany Boon réalisateur. Le rigolo en question a réussi à se remettre de la claque infligée par son premier film La Maison du Bonheur en 2006 avec pour résolution d’arriver à faire ses preuves une bonne fois pour toutes ! Après tout, la comédie c’est son rayon. Affublé de deux coscénaristes, il repart sur sa terre d’origine (le Nord-Pas-de-Calais) et en rapporte tous les clichés possibles et (in)imaginables. Le succès que rapporte le film en France est tel que moi, couillon et brave mouton, ai décidé de suivre le troupeau et de me lancer dans la salle obscure qui en ce vendredi 14h affiche complet !
Philippe Abrams mène une vie paisible à Salon-de-Provence où il est directeur à la Poste. Dans le but de donner une seconde chance à son couple en constante dégression, il demande sa mutation près de la mer. Pour s’assurer du succès de l’opération, il fraude et se fait passer pour handicapé. La hiérarchie découvre le pot aux roses et l’expédie direct dans le Nord-Pas-de-Calais en guise de punition. Se renseignant auprès de sa propre famille, Philippe apprend que le Nord est équivalent à l’enfer, une terre glacée peuplée de rustres au langage indéchiffrable, le « cheutimi ». Il part donc seul en laissant sa femme et son fils derrière lui…
Bienvenue chez les Ch’tis surprend car il remplit dûment son contrat. Le film met certes un petit moment à se mettre en place (avec l’accent bien prononcé sur tous les clichés du Nord : le froid, le ch’timi, la bouffe, etc.), mais une fois que le personnage arrive en territoire « Boonien », tout s’accélère. Le réalisateur est plus subtil qu’il n’y parait en ce qu’il démonte avec discrétion tous les clichés du genre et arrive à changer le point de vue du personnage (et des spectateurs) sur sa région. Certes, tout cela est édulcoré comme il se doit (« les gens du Nord ont dans le cœur le soleil qu’ils n’ont pas dehors » comme dirait l’autre…) mais c’est au profit d’une portée comique des plus savoureuses et dont le cinéma français nous privait depuis un long moment. Les scènes de beuverie, lors de la tournée ou à l’arrivée de l’épouse de Philippe dans le Nord sont magistrales. Le tout servi par des acteurs exceptionnels : le duo Boon-Merad fonctionnant à la perfection, de même que les seconds rôles Line Renaud, Patrick Bosso, Michel Galabru, Anne Marivin et Zoé Félix ajoutent chacun à leur façon une pointe d’excentricité bien agréable.
Le film met les pieds dans le plat : après tout, il aurait de quoi se mettre à dos les régions de Provence qui pour le coup ont droits eux-aussi à leur part de clichés et se trouvent bizarrement laissés pour compte. Dany Boon ouvre donc la guerre du « cinéma des régions »… Quoi qu’il en soit, Bienvenue chez les Ch’tis dispose d’un scénario solide aux dialogues percutants. N’étant rien de plus que ce qu’il prétend, le film a au moins le mérite de rehausser un tant soit peu l’état actuel de la comédie française. Certes, ce n’est pas un chef d’œuvre… mais pourquoi bouder notre plaisir ? Pour notre défense, valait mieux aller voir ça que le dernier Astérix…